Secteur hydroélectrique : Pourquoi une proposition de résolution européenne est-elle devenue nécessaire ?

Publié le 12/04/2019 dans les catégories Europe

Pourquoi une proposition de résolution européenne concernant l’avenir du secteur hydroélectrique est-elle devenue nécessaire ?

Depuis la perte du statut d’établissement public d’EDF en 2004, la Commission européenne fait pression sur la France pour obtenir, dans le cadre du renouvellement des concessions, l’ouverture à la concurrence de nos installations hydroélectriques.

Une nouvelle mise en demeure a été adressée le 7 mars 2019 au motif que la législation et la pratique des autorités françaises, qui ont autorisé le renouvellement ou la prolongation de certaines concessions hydroélectriques sans recourir à des procédures d’appel d’offres, seraient contraires au droit européen. Le gouvernement actuel a fait de la concurrence l’une de ses priorités et a ouvert une discussion pour répondre aux attentes de Bruxelles. Un large consensus se dessine pourtant, dans la population comme chez les élus locaux et nationaux, pour rejeter comme dangereuse et irrationnelle l’ouverture à la concurrence de ce secteur stratégique au plan économique, social et environnemental, qui s’adosse à un patrimoine financé de longue date par les Français et conservé en excellent état.

L’hydroélectricité recouvre de multiples enjeux : 

Un enjeu énergétique, puisque les barrages hydroélectriques sont encore la première source d’électricité renouvelable en France et produisent 12 % de notre mix électrique et sont le seul outil de stockage de masse d’électricité.

Un enjeu industriel, puisque la filière emploie 25 000 personnes et génère 1,5 milliard d’euros de recettes publiques.

Un enjeu environnemental et de service public incontournable qui intéresse les différents usages de la ressource en eau et le rôle propre des barrages sur nos territoires, en matière d’irrigation agricole, de fourniture d’eau potable, de soutien d’étiage, ou de tourisme. 

Un enjeu de sécurité, enfin, en matière notamment de gestion des crues et de fourniture de source froide des installations nucléaires.

L’injonction de Bruxelles se révèle d’autant plus absurde que chez ceux de nos voisins qui ne disposent pas d’un régime concessif, la mise en concurrence peut être exclue et n’a donc pas été mise en œuvre. Il appartient donc au gouvernement de défendre à Bruxelles une alternative solide à la mise en concurrence. Les traités autorisent notamment notre pays à organiser la fourniture de services en tant que services d’intérêt économique général, sous réserve du respect des dispositions de l’article 82 du traité CE et de l’article L. 420-2 du code de commerce sur l’abus de position dominante.

Les opérateurs historiques que sont Électricité de France, la société anonyme d’intérêt général Compagnie nationale du Rhône et à la Société hydroélectrique du midi, sont les seuls à offrir aujourd’hui des garanties suffisantes en matière de gestion des risques sécuritaires, de soutien à l’économie et à l’emploi et de prise en compte effective de la diversité des usages de la ressource en eau. Face aux risques engendrés par la mise en concurrence en termes de désoptimisation, de préservation de l’emploi et des atouts du système hydroélectrique français, il est aujourd’hui à la portée des autorités françaises de plaider en faveur d’une dérogation au principe de remise en concurrence. 

La simplicité pratique de la mise en œuvre d’une solution fondée sur l’existant et son intérêt en matière de politique de l’eau et de l’énergie justifie pleinement qu’elle soit défendue devant la Commission européenne. C’est une question de volonté politique. C’est dans cet esprit que les parlementaires d’opposition invitent le gouvernement à se rapprocher de ses partenaires européens en vue d’exclure explicitement le secteur hydroélectrique du champ de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur et de la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession.