« L’épidémie de bronchiolite n’est que la partie émergée de l’iceberg », dénoncent 41 députés Les Républicains

Publié le 07/11/2022 dans les catégories Santé Médias

JDD - Tribune publiée le 05.11.2022 - Le député Yannick Neuder (Les Républicains) et 40 de ses collègues, dont le président du groupe Olivier Marleix, jugent insuffisante la réponse du gouvernement à l’épidémie saisonnière de bronchiolites et appellent le ministre de la Santé, François Braun, à faire « plus et mieux » sur la crise des services pédiatriques.

Leur tribune : « Cette semaine, sous pression, le gouvernement a fait un petit pas vers les pédiatres qui font face à une crise profonde à nouveau mise en lumière par l’épidémie saisonnière de bronchiolites. Devant des services d’urgences pédiatriques en grande tension et des soignants à bout de souffle, le ministre de la Santé, François Braun, a dégainé une nouvelle enveloppe issue de négociations entre son ministère et les représentants des urgences pédiatriques. C’est salutaire mais bien insuffisant quand on sait que ces fonds d’urgence sont censés "faire tenir" durant trois ou quatre mois tout au plus. C’est sans compter sur la reprise de l’agenda politique d’un exécutif plus occupé à créer une troisième chambre parlementaire sous le nom de Conseil national de la Refondation tout en enjambant la première par 49-3 en série.

Quant aux premiers concernés, les avis sont plus que mitigés. Ces enveloppes ne constituent pas une solution pérenne. Pire, la FHF déplore une "politique de la rallonge permanente" basée sur un calendrier et une répartition des crédits encore flous.

"Ni cette épidémie de bronchiolites, ni la situation de la pédiatrie sont des faits nouveaux"

La situation de la pédiatrie est l’illustration parfaite du malaise qui a contaminé tout notre système de santé parallèlement à une procrastination du gouvernement dont le rôle ne se résume plus qu’à déployer des rustines faites d’enveloppes et de plans blancs lorsqu’il est au pied du mur.

Pourtant, ni cette épidémie de bronchiolites, ni la situation de la pédiatrie sont des faits nouveaux. Chaque année, l’automne marque l’arrivée des nombreux cas d’enfants atteints par le virus, cette tension des services d’urgences pédiatriques a déjà été observée de nombreuses fois avec plus ou moins d’intensité comme en 2019.

Cette situation appelle à une réponse de rupture, structurelle et il semble que ce soit la dernière main tendue au gouvernement de la part de l’opposition et des représentants hospitaliers. Assez de rapports, de missions flash et d’assises de la pédiatrie au printemps : le gouvernement a déjà toutes les données et toutes les cartes en main pour agir.

Les enseignements à tirer tiennent en 3 maitres mots : revalorisation, décentralisation et anticipation.

"La dégradation structurelle des moyens dédiés services pédiatriques a entrainé une fuite des soignants face à laquelle le gouvernement a trop longtemps tâtonné voir dévié"

Sur la revalorisation, la dégradation structurelle des moyens dédiés services pédiatriques a entrainé une fuite des soignants face à laquelle le gouvernement a trop longtemps tâtonné voir dévié. C’est notamment le cas durant le déploiement du Ségur de la Santé pour lequel la permanence des soins, c'est-à-dire le travail de nuit, ou le week-end et les jours fériés, n’a pas été revalorisée. Avec le plan d’urgence, du côté des hospitaliers, le soignant a vu sa prime de nuit augmenter d’1,79 euro de l’heure au maximum ! Du côté des libéraux, l’Igas pointe une rémunération de la pédiatrie clairement plus faible que les autres spécialités médicales et ce constat se confirme à l’échelle européenne.

Sur la décentralisation, nous devons décloisonner la ville et l’hôpital dans une grande réforme santé. Le système a besoin d’une réponse de rupture sur la médecine de ville, son rôle n’a pas été suffisamment inclus dans un nouveau modèle de prise en charge des enfants alors que le nombre de médecins en pédiatrie libérale baisse inexorablement depuis des années.

Sur l’anticipation, le rôle pédagogique et la prévention ont également été trop souvent délaissés : une réforme pour un rôle renforcé de la santé scolaire mais aussi de la protection maternelle et infantile (PMI). Comme l’a mis en lumière l’Iigas, les parcours de soins doivent être restructurés en réhabilitant et revalorisant notamment le rôle des puériculteurs et puéricultrices.

"La santé est encore trop souvent traitée de manière comptable dans notre pays"

L’exécutif occulte aussi un des cœurs du problème : la crise de sens et le nouveau rapport aux carrières médicales. Un constat fait depuis bien trop longtemps. La revalorisation financière est une première réponse mais il faut travailler à des mesures profondes notamment sur les effectifs et la répartition des soignants. De manière générale, une véritable réforme des études de santé qui ne s’appuie pas simplement sur un numérus apertus mais qui permette le redoublement en première année par exemple ou qui encourage à l’installation en zones sous dotées par un engagement dès la deuxième année doublé d’incitations fiscales plus généreuses et d’un conventionnement plus favorable.

Enfin, il faut aussi questionner le calcul de l’ONDAM proposé au Parlement chaque année. Ces objectifs de dépenses sont largement en deçà des exigences d’un système à bout de souffle, notamment en cette crise inflationniste qui sévit actuellement. Plus généralement, la santé est encore trop souvent traitée de manière comptable dans notre pays. Le projet de loi de finances de la sécurité sociale (PLFSS), examiné annuellement, a 26 ans ! Une nouvelle loi santé doit émerger, examinée plurianuellement, celle qui reposera sur les leçons apprises des crises sanitaires du 21e siècle.

Monsieur le Ministre Braun, la balle est dans votre camp. Nous attendons plus et mieux. »

Les signataires : 

  1. Yannick Neuder, Député de l’Isère
  2. Olivier Marleix, Président du Groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, Député d’Eure-et-Loir
  3. Annie Genevard, Présidente des Républicains, Députée du Doubs
  4. Emmanuelle Anthoine, Député de la Drôme
  5. Thibault Bazin, Député de Meurthe-et-Moselle
  6. Valérie Bazin-Malgras, Députée de l’Aube
  7. Emilie Bonnivard, Députée de la Savoie
  8. Jean-Yves Bony, Député du Cantal
  9. Ian Boucard, Député du Territoire de Belfort
  10. Jean-Luc Bourgeaux, Député d’Ille-et-Vilaine
  11. Hubert Brigand, Député de la Côte d'Or
  12. Fabrice Brun, Député de l’Ardèche
  13. Dino Cinieri, Député de la Loire
  14. Éric Ciotti, Député des Alpes-Maritimes
  15. Pierre Cordier, Député des Ardennes
  16. Josiane Corneloup, Députée de Saône-et-Loire
  17. Marie-Christine Dalloz, Députée du Jura
  18. Vincent Descoeur, Député du Cantal
  19. Fabien Di Filippo, Député de la Moselle
  20. Christelle D’intorni, Députée des Alpes-Maritimes
  21. Julien Dive, Député de l’Aisne
  22. Virginie Duby-Muller, Députée de la Haute-Savoie
  23. Nicolas Forissier, Député de l’Indre
  24. Marc Le Fur, Député des Côtes-d’Armor
  25. Justine Gruet, Députée du Jura
  26. Michel Herbillon, Député du Val-de-Marne
  27. Patrick Hetzel, Député du Bas-Rhin
  28. Philippe Juvin, Député des Hauts-de-Seine
  29. Véronique Louwagie, Député de l’Orne
  30. Alexandra Martin, Députée des Alpes-Maritimes
  31. Jérôme Nury, Député de l’Orne
  32. Éric Pauget, Député des Alpes-Maritimes
  33. Isabelle Périgault, Députée de Seine-et-Marne
  34. Christelle Petex-Levet, Député de la Haute-Savoie
  35. Alexandre Portier, Député du Rhône
  36. Nicolas Ray, Député de l’Allier
  37. Nathalie Serre, Députée du Rhône
  38. Michèle Tabarot, Députée des Alpes-Maritimes
  39. Jean-Pierre Taite, Député de la Loire
  40. Isabelle Valentin, Députée de Haute-Loire
  41. Stéphane Viry, Député des Vosges