Besoins urgents de recherche, de prévention, de diagnostic et de prise en charge des troubles psychiatriques et pédopsychiatriques en France

Publié le 23/06/2023 dans les catégories Santé Vie sociale

Patrick Hetzel cosigne une proposition de résolution qui est un appel au gouvernement pour soutenir la psychiatrie en France. En effet, aujourd’hui, plus d’un français sur cinq est touché par des troubles psychiatriques. Ceux-ci peuvent être de différentes natures : dépression, troubles anxieux, troubles alimentaires, autisme, schizophrénie ou encore bipolarité. La majorité des troubles psychiatriques apparaissent à l’adolescence, entre 15 et 25 ans, et les premiers symptômes de ces troubles sont souvent ignorés. Pourtant, mal diagnostiqués ou mal pris en charge, ces troubles altèrent considérablement la qualité de vie des malades : souffrances psychologiques, maladies cardiovasculaires. Ils représentent la première cause d’arrêts maladie en France.

Pour les cas les plus graves, les personnes atteintes de troubles psychiatriques ont en moyenne une espérance de vie inférieure de 10 à 20 ans par rapport à la population générale. Toutefois, trop peu de mesures de santé publique sont aujourd’hui prévues en France afin de prévenir et de détecter les troubles psychiatriques et pédopsychiatriques. D’autre part, le manque considérable de moyens alloués à l’offre de soins psychiatriques et pédopsychiatriques affecte considérablement l’égalité de traitement et la prise en charge des patients.

Si notre pays a joué un rôle central dans l’émergence et l’essor de la discipline de la psychiatrie – de Philippe Pinel qui l'inventa aux travaux de Jean-Martin Charcot sur le système nerveux en passant par la découverte par Henri Laborit des neuroleptiques et anxiolytiques, force est de constater qu’aujourd’hui, la France est devenue un néant psychiatrique. Nous assistons à une véritable désertification psychiatrique ! La prise en charge de patients se dégrade très fortement et la perte d’attractivité se traduit donc par une fuite des soignants.

En effet, parent pauvre de la médecine, aujourd'hui en grande difficulté, la psychiatrie et la pédopsychiatrie publiques manquent d'argent et d'effectifs : 30 % des postes de psychiatres hospitaliers sont vacants et le nombre de postes d'infirmiers non pourvus a doublé entre 2019 et 2022. De plus, en 2020, l’Allemagne comptait 1302 lits de psychiatrie pour 1 million d’habitants contre 796 lits en France. Par ailleurs, en dix ans à peine, le budget alloué à la psychiatrie dans notre pays a chuté de près de 13% et a progressé deux fois moins vite que les dépenses globales de santé.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 n'apporte aucune réponse pour sortir la psychiatrie de cette situation critique alors même que le nombre de patients augmente et notamment depuis la crise du Covid-19.

La pédopsychiatrie est davantage touchée et fait face à une situation « catastrophique ». Les soignants sont en grande difficulté. Des enfants et leurs parents souffrent du manque d'accompagnement, alors que les files d'attente s'allongent dans les centres médico-psychologiques et médico-psycho-pédagogiques. Depuis des années, les professionnels tirent la sonnette d'alarme. Ils sont à bout.

A ce jour, on estime environ que 1 750 enfants sont en attente de places en établissement spécialisé. Certains d’entre eux sont « sans solution » : sans scolarité, sans soins, sans éducation autre que la famille à la maison. Le rapport du Sénat sur la psychiatrie des mineurs de 2017 indiquait déjà le « constat d’une grande difficulté de la discipline, traversant une crise démographique ne lui permettant pas de répondre à ses besoins en évolution ». Cette situation a été rappelée à l’occasion des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie en 2021.

En conséquence, à l’occasion d’une tribune parue dans la presse le 24 novembre 2022, un collectif de soignants indiquait qu’en conséquence de ce manque de moyens et pour répondre aux multiples sollicitations, « les services doivent, malgré eux, réaliser un « tri » des patients, car ils ne peuvent pas répondre à toutes les demandes.  Les urgences et les situations graves, de plus en plus graves, car ayant eu à attendre longtemps un premier rendez-vous, augmentent sans cesse. Les professionnels sont débordés et doivent s’infliger ce « tri » ».

La recherche en santé mentale n’est pas suffisante ! Enfin, la recherche et l'innovation en psychiatrie et pédopsychiatrie stagnent en France, faute d’investissements massifs, alors qu'elles connaissent un puissant essor aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Europe du Nord. Par exemple, alors que la France consacre seulement 4 % du budget de la recherche médicale à la santé mentale, les Etats-Unis lui allouent 16 % de leur budget et les start-ups américaines investissent plus d'un milliard de dollars par an dans la psychiatrie. La France, pionnière en termes de recherche scientifique, doit impérativement rattraper son retard en la matière et l’Etat doit y prendre toute sa responsabilité.

C’est pourquoi la proposition de résolution invite le Gouvernement à se mobiliser beaucoup plus concrètement afin de répondre à cette demande urgente de prévention, de diagnostic et de prise en charge, notamment par la création d’un Institut national de la santé mentale.