Commission d’enquête parlementaire sur la lutte contre les fraudes aux prestations sociales
Publié le 31/01/2020 dans les catégories Economie Vie sociale
Lors de la séance d’installation de la commission d’enquête du mercredi 29 janvier, Patrick Hetzel a été élu à l’unanimité, président de cette commission.
La question de la fraude sociale a fait l’objet d’un rapport, commandé en mai 2019 par le Premier Ministre à la sénatrice UDI de l’Orne, Nathalie Goulet, et à la députée LREM de Meurthe-et-Moselle, Carole Grandjean. Elles ont remis leur rapport au gouvernement mardi 5 novembre 2019. Edouard Philippe les avait missionnées fin mai afin de « procéder à une évaluation robuste et objective du coût de la fraude aux prestations sociales ». Jusqu’ici, les chiffres varient du tout au tout. En décembre 2018, un magistrat spécialisé dans la fraude fiscale et sociale, Charles Prats, avait évalué, sur un total de 450 milliards de prestations, à 14 milliards d’euros annuels le montant des escroqueries aux prestations sociales liées à l’existence de faux numéros d’immatriculation de personnes nées à l’étranger. Mi-septembre, un rapport de la commission des affaires sociales du Sénat indiquait que la fraude aux « faux numéros » de sécurité sociale s’évaluerait entre 117 et 138,6 millions d’euros par an, selon le rapporteur Modem de la commission, Jean-Marie Vanlerenberghe. Soit 100 fois moins…
Le rapport des parlementaires avait donc vocation à apporter de la clarté dans le débat, mais la conclusion du rapport fut décevante : en effet, les deux parlementaires concluent ne pas être en possibilité de chiffrer la fraude. La raison de ce silence est, elle, scandaleuse. En effet, la sénatrice Nathalie Goulet a déclaré « nous n’avons pas eu les moyens de chiffrer car les administrations nous ont fermé les portes ». Les rapporteures ont toutefois indiqué que « si le chiffrage de la fraude aux prestations sociales est difficile à estimer, chacun s’accordera à partager qu’elle est largement sous-estimée du fait de son caractère dissimulé ».
L’architecture des prestations sociales en France s’est stratifiée au fil des années avec des prestations nouvelles ou transformées au rythme des réformes. Cette organisation est devenue complexe et réalisée en silo par chaque organisme de protection sociale et avec un système d’information développé par chacun sans prévoir l’interconnexion des données. Ce système, très longtemps organisé à l’échelle départementale, manque d’adaptation aux nouvelles mobilités et modes de vie, à la gestion dématérialisée et massive des données, à l’organisation complexe de notre protection sociale ainsi qu’aux récentes évolutions législatives, tel que le droit à l’erreur.
Alors que les prestations versées chaque année atteignent 450 milliards d’euros, la mise en place de politiques efficaces pour prévenir et recouvrer les montants liés à la fraude est un enjeu essentiel de bonne gestion de nos deniers publics et de justice sociale. Nos concitoyens doivent avoir la certitude qu’ils sont traités de façon équitable. Le groupe les Républicains a soutenu la création de cette commission d’enquête en espérant qu’elle permette, d’une part, d’apporter de la clarté dans le débat et, d’autre part, de rappeler aux responsables des administrations qu’ils sont au service du parlement.