Emanciper et responsabiliser, enjeux de toute éducation
Publié le 13/06/2025 dans les catégories Education nationale Vie sociale
Patrick Hetzel a participé au colloque de clôture de l’Académie d’Education et d’Etudes Sociales au Sénat sur le thème « De la liberté de l’esprit à l’engagement ».
Synthèse de l’intervention.
« Madame la Présidente,
Mesdames, Messieurs,
Parler d’émancipation et de responsabilisation, c’est placer l’éducation au cœur de sa mission la plus noble : faire grandir un être humain libre, conscient et capable de choix. Ce double objectif engage profondément deux institutions fondamentales : la famille et l’Éducation nationale. Elles sont à la fois partenaires et vecteurs de transformation.
La question qui nous rassemble aujourd’hui est donc cruciale : Comment famille et école peuvent-elles, ensemble, permettre à chaque enfant de devenir un individu libre et responsable ?
1. L’émancipation : un processus de libération progressive
Émanciper, c’est libérer l’enfant des tutelles, mais pas de manière précoce ou brutale. L’émancipation ne signifie pas l’autonomie immédiate, mais un cheminement construit, balisé par des repères. Dans la famille, cette émancipation commence par la confiance, la parole donnée, l’exemple. Elle se nourrit d’un cadre stable, affectif et sécurisant. C’est dans ce premier cercle que l’enfant apprend à se penser comme sujet. À l’école, l’émancipation passe par l’accès au savoir, à la pensée critique, à la diversité des points de vue. Elle implique une pédagogie qui ne dicte pas, mais interroge ; qui ne conditionne pas, mais éclaire.
2. Responsabiliser : transmettre les règles de la vie commune
Responsabiliser, c’est faire de l’enfant un acteur de sa vie et un citoyen en devenir. Cela nécessite un apprentissage des règles, mais aussi de leurs raisons. Dans la famille, on apprend à prendre soin de soi, des autres, à respecter l’autre dans l’intimité. La responsabilité s’exerce dans les petites tâches du quotidien, dans la manière de vivre ensemble. À l’école, on apprend à débattre, à faire des choix, à reconnaître ses erreurs. On y fait l’expérience du collectif, des droits, mais aussi des devoirs. Responsabiliser ne consiste pas à culpabiliser, mais à faire comprendre que nos choix ont des conséquences. C’est un acte profondément éducatif.
3. Famille et école : des rôles distincts mais complémentaires
La famille éduque avec l’intuition de l’amour, l’école avec la rigueur du savoir. Il ne s’agit pas d’opposer ces deux sphères, mais de les articuler dans une alliance éducative. Quand la famille transmet les valeurs fondatrices, l’école les éclaire et les met en perspective. Quand l’école enseigne la méthode, la rigueur et l’esprit critique, la famille peut donner du sens et de la continuité. L’enfant navigue entre ces deux mondes. S’il perçoit une cohérence, il avance. S’il ressent une fracture, il doute.
4. Quelques enjeux actuels
Dans un contexte de transformations rapides — numériques (développement de l’I.A. par exemple), sociales, culturelles — l’enfant est souvent exposé à des injonctions contradictoires. Cela rend l’éducation plus exigeante, mais aussi plus nécessaire que jamais.
L’émanciper, ce n’est pas céder à tous ses désirs. Le responsabiliser, ce n’est pas lui transférer nos inquiétudes ou nos charges. C’est lui permettre de se construire une colonne vertébrale : libre dans ses choix, mais solide dans ses repères.
Conclusion
« Éduquer, c’est aimer deux fois : c’est aimer l’enfant tel qu’il est, et l’aimer assez pour croire en ce qu’il peut devenir. »
L’émancipation et la responsabilité ne s’opposent pas : elles sont les deux ailes de l’éducation si vous me permettez cette métaphore autour de l’oiseau. Mais pour qu’elles s’élèvent, encore faut-il que famille et école battent ensemble telles les deux ailes d’un oiseau !
Je vous remercie. »