Mieux protéger et accompagner les enfants de violences intrafamiliales

Publié le 15/03/2024 dans les catégories Justice Vie sociale

« Madame la Présidente, Monsieur le ministre, mes chers collègues,

Nous examinons aujourd’hui la version définitive de la proposition de loi visant à mieux protéger les enfants victimes de violences intrafamiliales. Ce texte important qui a démarré son chemin législatif en décembre 2022 permettra de suspendre l’autorité parentale et le droit d’hébergement dès l’ouverture d’une enquête pour crime ou violences sexuelles sur l’enfant ou crime sur l’autre parent. Le retrait de l’autorité parentale demeure, dans notre culture, un acte difficile à envisager. Pourtant, cette option est devenue nécessaire et même indispensable dans l’éventail des moyens de protection de l’enfant victime de sa famille. Cette proposition de loi vient apporter une réponse à la terrible réalité vécue par des centaines de milliers d’enfants victimes d’inceste ou de violences intrafamiliales. En effet, chaque année en France, près de 160 000 enfants sont encore victimes de violences sexuelles. En 2021, 208 000 victimes de violences conjugales ont été recensées, dont 80 % avaient des enfants.

Le rapport Sauvé publié en octobre 2021 estime même que près de 15 % des femmes et plus de 6 % des hommes majeurs auraient été sexuellement agressés lorsqu’ils étaient mineurs, soit environ 10 % de la population globale. C’est dire l’ampleur du phénomène et l’importance de l’enjeu dont nous sommes saisis. Concrètement, le retrait de l’autorité parentale prive l’un des parents de l’ensemble de ses attributions, y compris les plus symboliques comme par exemple le droit de consentir au mariage de son enfant. Ce retrait revient également à confier exclusivement à l’autre parent le soin de veiller sur l’enfant et de prendre les décisions nécessaires pour sa santé, son éducation, etc.

Depuis des décennies, les philosophies des acteurs de la protection de l’enfant s’opposent sur ce sujet. Le législateur doit aujourd’hui trancher : il est indispensable de sanctionner le parent coupable de violences extrêmement graves sur l’enfant et de protéger cet être vulnérable physiquement en l’éloignant juridiquement de l’autorité dont il dépend et qui le détruit. A ce titre, Madame la rapporteure, je veux saluer votre travail et votre engagement constant sur ce texte. Aujourd’hui avec votre travail, nous allons faire avancer cette cause. Depuis quelques années, un chemin avait déjà été engagé et des avancées importantes ont été obtenues :

  • La loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, portée par mon collègue Aurélien Pradié que je salue, et adoptée à l’unanimité, a créé un mécanisme de suspension provisoire de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement du parent poursuivi ou condamné, même non définitivement, pour crime contre l’autre parent.
  • La loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales a, par exemple, élargi les cas dans lesquels les parents peuvent se voir retirer totalement l’autorité parentale ou son exercice, par une décision expresse du jugement pénal, aux cas dans lesquels des parents ont été condamnés pour des délits sur l’autre parent.

Veiller à la protection des enfants, à ceux qui n’ont pas leur mot à dire car ils ne peuvent tout simplement pas les raconter est notre devoir collectif. C’est donc à nous de les aider en agissant.

  • 400 000 enfants vivent dans un foyer dans lequel s’exercent des violences conjugales,
  • 160 000 enfants subissent, chaque année, des violences sexuelles en France,
  • Dans 90 % des cas, l’agresseur est un homme et dans la moitié des cas, il est un membre de la famille.

En ce sens, l’objectif principal qui doit nous guider aujourd’hui est celui de la protection des victimes et la préservation de l’intérêt supérieur de l’enfant. C’est pourquoi nous voterons ce texte, car le retrait de l’autorité parentale est une mesure indispensable pour arrêter la reproduction de la violence familiale au sein des générations suivantes. Je vous remercie. »