Projet de loi pour renforcer la lutte contre les dérives sectaires

Publié le 22/03/2024 dans les catégories Santé Vie sociale

Le projet de loi pour lutter contre les dérives sectaires a une nouvelle fois été débattu à l’Assemblée nationale suite à l’échec de la commission mixte paritaire entre le Sénat et l’Assemblée nationale. Comme lors de la précédente lecture, Patrick Hetzel a cosigné et voté en faveur d’un amendement qui prévoit la suppression de l’article 4 de ce projet en s'appuyant sur l'avis du Conseil d'Etat. En effet, l’article 4 prévoit de réprimer la provocation à l’abandon de soins ou à l’adoption de pratiques dont il est manifeste qu’elles exposent la victime à un risque grave ou immédiat pour sa santé, que la provocation ait été suivie ou non d'effet. S’il est incontestable que la multiplication des pratiques consistant à promouvoir l’abandon de soins pourtant nécessaires à la santé ou l’adoption de certaines pratiques présentées abusivement comme bénéfiques à la santé appelle à une réponse ferme des pouvoirs publics, cette disposition frappe par sa fragilité juridique et les difficultés constitutionnelles comme pratiques qu’elle emporte. En effet, d’un constat partagé avec le Conseil d’État, « ni la nécessité, ni la proportionnalité de ces nouvelles incriminations ne sont avérées ».

En premier lieu, de nombreuses incriminations existantes, telles que l’exercice illégal de la médecine, l’homicide involontaire ou les pratiques commerciales trompeuses, sont déjà réprimées et plus sévèrement que ce que propose l’article 4 : la nécessité de légiférer sur ce point n’est donc pas établie. En second lieu, en l’état de la rédaction de cet article, un discours général et impersonnel, sans condition de pressions ou de contacts directs ou répétés entre l’auteur et la victime, assurant la promotion de pratiques dites « non conventionnelles » ou contestant l’état actuel des pratiques thérapeutiques pourrait être réprimé. Dès lors, une telle rédaction n’atteint manifestement pas un équilibre satisfaisant dans la conciliation entre l’exercice de la liberté d’expression et la liberté de choix et de refus des soins, et l’objectif de protection de la santé publique ainsi poursuivi. Il en va ainsi, a fortiori, lorsque d’autres incriminations, moins attentatoires aux droits et libertés constitutionnellement garantis ne soient suffisantes pour atteindre cet objectif.

Hélas, cet amendement n’a pas été adopté. C’est la raison pour laquelle, malgré quelques dispositions intéressantes, Patrick Hetzel comme ses collègues du groupe Les Républicains, s’est abstenu sur l’ensemble du projet de loi, considérant que le travail devait se poursuivre au Sénat et qu’ensuite une co-construction entre sénateurs et députés puisse se faire afin de que le texte soit plus équilibré.