Constitutionnalisation du droit à l’I.V.G. le 4 mars 2024

Publié le 08/03/2024 dans les catégories Vie sociale

Explication de vote du député Patrick Hetzel :

« La question qui était posée au constituant n’était pas pour ou contre l’IVG mais la question de la constitutionnalisation de ce droit (et uniquement ce droit).
Permettez-moi de vous donner les raisons de mon vote : elles sont bien précises.
Il ne porte pas sur l’IVG mais sur le fait que le contexte qui nous était proposé, contrairement à ce que disent certains, n’est pas une reprise de la loi Veil mais d’une seule et petite partie de cette loi. Uniquement le droit à l’IVG alors que la loi Veil est une loi d’équilibre entre trois droits : le droit des femmes à disposer de leur corps, le droit à l’objection de conscience pour les professionnels de santé et enfin la protection de la vie à naître.
D’ailleurs, dès le lendemain du vote à Versailles, des parlementaires du groupe LFI ont déclaré que le combat devait continuer et qu’il fallait désormais supprimer la clause de conscience pour les professionnels de santé dans la loi ordinaire.
Constitutionnaliser l’un des trois éléments sans les deux autres me pose un vrai problème de conscience car on a créé un déséquilibre entre les trois éléments constitutifs de la base même de la loi Veil. D’autant que je pense que l’on ne peut pas obliger un professionnel de santé à pratiquer un avortement s’il ne le souhaite pas. Un observateur attentif des débats à l’Assemblée nationale pourra constater que j’ai tenté avec d’autres collègues de mon groupe parlementaire de faire en sorte que l’on constitutionnalise toute la loi Veil, c’est à dire le triptyque d’équilibre. Constitutionnaliser le droit à l’IVG sans en faire autant pour la clause de conscience des professionnels de santé (rappelons ici que la loi Veil a prévu une clause de conscience spécifique à l’acte d’IVG) ni pour la protection de la vie à naître, c’est juridiquement créer un déséquilibre puisque le premier principe (le droit à l’IVG) étant dans la loi fondamentale, il devient supérieur aux deux autres principes qui ne sont que dans la loi ordinaire. C’est donc bien la création d’un déséquilibre juridique susceptible de fragiliser les deux principes qui sont uniquement dans la loi ordinaire par rapport à celui qui est dans la constitution. L’équilibre qui avait été créé par la loi Veil a donc bien été rompu par le texte qui nous a été proposé.
C’est donc en mon âme et conscience que j’ai rejeté le texte qui nous était proposé car ce qui a été constitutionnalisé est à mon sens problématique et va potentiellement amener des dérives comme par exemple la suppression de la clause de conscience en s’appuyant d’ailleurs sur la hiérarchie des normes juridiques pour dire que ce qui est dans la constitution doit justifier une telle modification de la loi ordinaire. »