L'Express : Blog, les cuisines de l'Assemblée

Publié le 01/10/2018 dans les catégories Médias

Vent de rébellion sur les questions écrites

« Un député n'a pas de pouvoir, mais peut avoir de l'influence » a récemment déclaré le député Roland Lescure dans la presse. Il y a toutefois au moins une prérogative (outre le droit d'amendement) à laquelle les députés semblent attachés : celle d'interpeller le gouvernement, avec l'obligation pour lui de fournir une réponse.

Nous ne parlons pas des Questions au gouvernement – à l'intérêt limité – mais bien des Questions écrites, publiées au Journal officiel. En théorie, les ministères ont deux mois pour répondre. Mais le nombre des « QE » ayant augmenté de façon exponentielle lors des dernières décennies, le taux de réponse des ministères n'a cessé de se dégrader.

En 1994, on a donc inventé les questions écrites signalées : les groupes parlementaires ont la possibilité de « signaler » des questions sans réponse, et le délai est alors de 10 jours. Pourtant, le taux de réponse à ces questions n'est guère meilleur que celui des QE non-signalées.

Alors en 2014, une nouvelle rustine a été inventée : le plafonnement des QE. Il faut dire que le succès des QE venait en partie du fait qu'il s'agit d'un outil relativement facile à utiliser et qui fait partie des critères statistiques d'activité parlementaire scrutés par les observateurs. Lorsque nous avions fait le bilan de ce plafonnement l'an dernier, nous avions constaté que la limitation du nombre des QE n'avait pas vraiment amélioré le taux de réponse dans les délais (25-30%).

Les QE existent depuis 1909 mais elles ne sont prévues que dans le Règlement de l'Assemblée. Pour le gouvernement, il n'y a donc aucune contrainte de type constitutionnelle ou équivalente. Et depuis 1909, le poids du Parlement dans le régime politique français n'est pas franchement allé en augmentant.

Alors, quand tout ou presque a été tenté, que reste-t-il ? Alpaguer le gouvernement directement. Au début de la toute première séance qu'il a présidé, Richard Ferrand a profité de la présence du Premier ministre pour attirer son attention sur le sujet.

On apprend ainsi que, sur toutes les questions posées depuis juin 2017, 60% des QE ont obtenu une réponse. Parmi celles-ci, près de 50% avaient eu une réponse dans les délais, ce qui est une amélioration sensible par rapport à la précédente législature… même si la « règle » ne reste qu'à moitié respectée.

Une autre méthode moins diplomatique consiste à interpeller énergétiquement un ministre pendant une audition. C'est ce qu'a fait le député LR Patrick Hetzel en Commission des finances…

… même si la question avait été redirigée vers un autre ministère.

Les Questions écrites vont-elles devenir le symbole d'un Parlement qui tente de garder sa voix face au gouvernement ?

Article publié le 28/09/2018 - Brice Lacourieux