Reconnaître et accompagner les patients atteints de Covid-long

Publié le 08/01/2021 dans les catégories Santé

Patrick Hetzel a cosigné une proposition de résolution concernant la question des patients atteints de Covid-long. En effet, si la crise sanitaire fait encore rage en France, le décompte des contaminations, hospitalisations et décès ne semble toutefois constituer que la partie visible d’une maladie aux multiples visages. Les prémices de la pandémie étaient ainsi marquées par l’impression générale que la Covid-19 était une maladie courte et relativement bénigne qui durait moins de quinze jours, la plupart des recherches se concentrant alors sur la proportion beaucoup plus faible de patients qui tombaient gravement malades ou décédaient. Pourtant, essoufflements, fatigue, difficultés de concentration, douleurs thoraciques, musculaires et articulaires... une cinquantaine de symptômes sont au moins dénombrés par certains patients contaminés par le Sars-CoV-2, des semaines, voire des mois après leur exposition au virus. Sans justifier une hospitalisation, ces manifestations persistantes de la Covid-19, aussi diverses qu’invalidantes, constituent les conséquences de la maladie pour des patients touchés par ce qui est dorénavant communément appelé « Covid-long ».

Ces conséquences sont telles que, plusieurs mois après, ces personnes sont épuisées, atteintes psychologiquement, physiquement mais également souvent financièrement avec d’éventuelles implications sur leurs vies professionnelles et personnelles. C’est la double-peine pour les personnes isolées, qui ne peuvent compter sur leur entourage familial ou amical pour les aider dans leur quotidien. Cette souffrance est d’autant plus amplifiée par l’absence de certitudes quant à la fin de ce mal et à l’existence d’un traitement efficace, alors que la plupart des malades n’ont même jamais été testé pour la Covid, ce sont pourtant les plus nombreux, en partie parce que les tests sont longtemps restés limités.

C’est d’abord sur les réseaux sociaux que les témoignages sont apparus, dès le mois d’avril. Peu d’inquiétude au premier abord, tant ces symptômes viraux qui se prolongent quelque temps chez l’adulte sont habituellement traités par les médecins. Mais la persistance des symptômes post-Covid au-delà de trois mois, combinés à leur caractère polymorphe, a fini par interpeller les professionnels de santé, démunis face à cette résurgence difficile à anticiper et traiter. Il s'agit en effet d'une maladie nouvelle dont les symptômes ne sont pas toujours visibles. C’est ainsi qu’est née #ApresJ20 – Association Covid Long France. « Notre but est d’informer sur le Covid long pour éviter à des milliers de personnes de se retrouver peut-être avec un handicap à vie, indique Pauline, 27 ans, porte-parole et présidente de l’association. Il n’y a pas que des gens qui guérissent, ou qui meurent ». Contaminée mi-mars, cette chercheuse doctorante en nutrition a dû retourner vivre chez ses parents : « J’ai une dysautonomie, c’est à dire un dérèglement du système nerveux autonome, une dyspnée ou syndrome d’hyperventilation, et une suspicion de péricardite ». Maux auxquels il faut également ajouter des troubles cognitifs et, selon ses propres termes, « une fatigue enveloppante ».

Une enquête menée par l’AP-HP auprès de 600 patients, détaille que ces malades de la Covid peuvent présenter des troubles neurologiques, mais aussi digestifs, ORL ou gynécologiques, qui les handicapent toujours plus ou moins lourdement, au moins trois semaines après leur contamination. Une enquête des CDC d’Atlanta sur des patients symptomatiques mais non hospitalisés, conclut que des symptômes persistent chez au moins un tiers des malades deux à trois semaines après leur primo-infection. L’AP-HP, elle, retient un taux compris entre 10 et 15%.

Une étude danoise conduite aux Îles Féroé parue dans Clinical Infectious Disease conclut que, chez une partie non négligeable des patients, les symptômes peuvent mettre des mois à se résorber, même chez les personnes n'ayant eu que des symptômes modérés de Covid-19. Le nombre de malades reste donc encore difficile à chiffrer, tout comme la durée des symptômes à partir de laquelle la Covid-19 peut être qualifiée de « long ».

Pour tous ces patients, il est toutefois nécessaire de poursuivre les investigations pour mieux cerner la prévalence, établir des critères diagnostics et déterminer l'étiologie de la maladie. Tout cela, dans le but de proposer aux patients des traitements médicaux adaptés. Certains hôpitaux ont créé des consultations spécialement dédiées à cette nouvelle maladie de longue durée, quand sa reconnaissance et détection restent difficile. Une étude appelée « Colocate » a également été lancée par le centre hospitalier de Tourcoing (Nord). Elle a pour vocation de tenter de faire la lumière sur ce Covid-long. Force est toutefois de constater la marginalité de ces initiatives qui en sont à leurs balbutiements. Le syndrome a pourtant été reconnu en août par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il est pris très au sérieux au Royaume-Uni, où une quarantaine de consultations dédiées ont été créées.

En France, la Haute Autorité de santé commence tout juste à réfléchir à la façon d’aider ces patients complexes. Ce silence, notamment de la part de nos pouvoirs publics, est inexplicable tant les malades sont en souffrance, le diagnostic n’étant pas posé, et les médecins mal informés. Cette maladie reste mal comprise et son absence de prise en compte dans nos politiques publiques sanitaires est inacceptable. L’OMS a d’ailleurs appelé à deux reprises les gouvernements à s’engager sur le sujet. Pour l’ensemble de ces motifs, il est urgent qu’un véritable programme sanitaire à la hauteur des conséquences de l’épidémie de la Covid‑19, soit mis en œuvre, pour que les médecins et les scientifiques mènent une recherche sur les conséquences de cette dernière, sur la santé physique et mentale des patients, afin d’établir une liste complète des symptômes, de leurs expressions, de les documenter et de les rendre publics auprès des patients et des médecins. Sans ce travail, il sera impossible d’identifier et de faire reconnaitre l’ensemble des pathologies comme il se doit, et d’assurer l’accompagnement des patients.