Un manque de stratégie ministérielle en matière d’enseignement et de recherche

Publié le 29/10/2020 dans les catégories Enseignement Sup & Recherche

Patrick Hetzel est intervenu dans l’hémicycle le 26.10.20 comme orateur du groupe Les Républicains, au moment de la discussion générale du budget 2021 de la mission Enseignement Supérieur et Recherche :

 

"Madame la Président, Madame la Ministre, Monsieur le Président de la commission des finances, Mesdames et Messieurs les rapporteurs, Mes chers collègues,

Un projet de budget n’a de sens que par rapport à un projet politique et une vision stratégique concernant le périmètre ministériel concerné.

En matière d’enseignement et de recherche, le premier constat que l’on peut faire c’est que l’on ne comprend pas très bien quelle est la véritable stratégie ministérielle. Quelle est la vision à court, moyen et long terme de ce gouvernement pour l’enseignement supérieur et la recherche français ?

Vient s’ajouter à cela le fait que depuis 2017, en somme depuis que vous êtes ministre, chaque année, votre discours est le même : ce budget est historique et inédit.

Ce qui est inédit, Madame la Ministre, c’est que depuis 2017, il y a une constante : lorsque l’on compare vos projets de budgets avec l’exécution budgétaire, on s’aperçoit que vous annulez des crédits en cours d’année par rapport à ce que nous avons voté et vous sous exécutez votre budget. Mais c’est sans doute Berçy et Matignon qui vous obligent à le faire.

Vous comprendrez donc aisément Madame la ministre, que lorsque nous vous voyons revenir pour la quatrième année de suite en nous disant : « ce budget de l’enseignement supérieur et de la recherche est historique ! » non seulement nous avons du mal à vous croire mais de plus, nous pensons que la ficelle est un peu grosse. Sans compter que votre affirmation au Mans devant des enseignants-chercheurs il y a quelques jours, selon laquelle depuis 20 ans rien n’avait été fait, est non seulement mensongère et scandaleuse mais elle décrédibilise votre propre parole politique.

Mais venons-en à votre trajectoire budgétaire à la fois de votre projet de loi concernant la recherche et celle très immédiate de l’année 2021 à venir pour toute la mission enseignement supérieur et recherche.

Le point fondamental de mon propos c’est que je pense que contrairement à ce que vous nous annoncez, vous allez continuer à procéder à une forme d’asphyxie budgétaire des opérateurs de l’enseignement supérieur et de la recherche par une prise en compte uniquement partielle dans leur budget de la cotisation employeur pour les retraites des fonctionnaires. La fameuse contribution au CAS pension (compte d’affectation spéciale). Cette asphyxie est palpable pour tous les organismes de recherche de même que pour les établissements d’enseignement supérieur et de recherche.

Ma première question porte donc sur ce point et d’ailleurs vous n’y avez jamais répondu malgré nos interrogations répétées à ce sujet au cours des débats concernant la loi recherche, il y a quelques semaines.

Dans le même ordre d’idée, cette asphyxie est encore amplifiée par une seconde difficulté : vous ne compensez nullement, le fameux GVT, le glissement vieillesse technicité. Entre les organismes de recherche et les établissements d’enseignement supérieur et de recherche, on peut considérer que cela pèse annuellement à hauteur d’une centaine de millions d’euros sur les opérateurs concernés, réduisant d’autant leurs capacités d’action.

Ma deuxième question porte donc sur cette question du GVT : madame la Ministre allez-vous le compenser pour les opérateurs de la MIRES ?

L’asphyxie à laquelle je fais référence est encore aggravée dans l’enseignement supérieur par le fait que le nombre d’étudiants n’a cessé de croître ce qui a pour conséquence que vous, en tant que ministre, vous détenez un triste record. En effet, vous êtes la ministre qui enregistre le plus mauvais taux du nombre d’étudiants par enseignant en France. Cet indicateur est fortement passé au rouge depuis 2017: seuls trois pays de l’Union européenne ont un plus mauvais taux que la France aujourd’hui alors qu’en 2014 il y en avait encore 7.

Nous sommes donc aussi en train de creuser l’écart par rapport à la plupart des pays de l’Union européenne puisqu’en France le budget des établissements n’a fait que décroître ces dernières années en euros courants parallèlement à l’augmentation du nombre d’étudiants accueillis dans l’enseignement supérieur. Il en résulte que la dépense par étudiant a diminué depuis que vous êtes ministre aussi bien en euros courants qu’en euros constants.

Plus je regarde vos actions et je les mets en parallèle avec les budgets, plus je m’inquiète pour notre enseignement supérieur et notre recherche car malgré les chiffres que vous annoncez, il y a un effet « trompe l’œil » et on a du mal à comprendre comment le processus d’asphyxie des opérateurs que je viens de décrire à l’instant pourrait s’enrayer avec le budget que vous nous présentez.

Pour toutes ces raisons, mon groupe parlementaire Les Républicains, va voter contre ce budget de la MIRES."