Légalisation de l'euthanasie : communiqué de presse
Publié le 06/04/2021 dans les catégories Santé
Communiqué de presse conjoint de Messieurs Xavier Breton, Patrick Hetzel, Marc Le Fur, Julien Ravier et Frédéric Reiss, députés
Depuis plusieurs jours, parce que nous avons déposé de nombreux amendements, d’aucuns nous accusent, parfois même très violemment et sans retenue, de faire obstruction au débat sur la proposition de loi concernent l’euthanasie, y compris son auteur et rapporteur.
Nous tenons ici à remettre le dépôt de nos amendements dans leur contexte. En effet, au moment même où un groupe parlementaire prend la responsabilité de programmer dans une journée dite de « niche parlementaire » un texte de société comme celui de l’euthanasie, il sait pertinemment que ce débat ne pourra pas aller au bout dans le temps imparti et nécessairement contraint. En cela, nous accuser d’obstruction est une duperie politique. D’autant que la programmation de ce texte s’effectue dans une précipitation très inhabituelle et inadaptée à son contenu même.
Chacun sait bien que le seul moyen dont dispose un parlementaire pour s’exprimer dans un débat, c’est de déposer des amendements. C’est la possibilité, grâce à ce droit d’amendement, de pouvoir faire entendre ses arguments dans le débat. Avant de passer au vote d’un texte de loi, il est indispensable qu’il y ait un échange de point de vue, c’est-à-dire que tous ceux qui ont des arguments à avancer, puissent le faire. Nous avons l’impression que d’aucuns cherchent à clore le débat avant même qu’il n’ait lieu en cherchant à discréditer la parole de ceux qui voudraient faire entendre un point de vue différent. Nous réclamons ici simplement le droit de dire que nous avons une voix à porter et cela est bien légitimé par les textes qui régissent le fonctionnement de l’Assemblée nationale. Cette voix est elle aussi trans-partisane. Dans une vraie démocratie, il faut que chacun puisse s’exprimer en son âme et conscience. Le vote n’a de sens que lorsqu’un temps consacré au véritable débat a été possible préalablement. Ne perdons jamais de vue que dans un hémicycle, il peut y avoir des tournants dans le débat lorsque le doute s’installe ou lorsque finalement on arrive à mettre en perspective les difficultés liées à un projet législatif. Et si la majorité est attachée à ce texte, juridiquement elle peut le reprendre et le programmer à l’agenda du Parlement pour permettre un débat digne de ce nom sans temps contraint comme c’est le cas pour une niche parlementaire.
Enfin, sur le fond, nous considérons que l’euthanasie est une question essentielle. Il ne s’agit pas d’une banale évolution de la loi mais d’un changement radical qui ne peut être pris à la légère. Il revient à dire à autrui : « oui, tu as raison, ta vie ne vaut plus la peine d’être vécue ». Il revient à considérer que donner la mort serait une forme de « thérapie ultime ». Et enfin, il revient à permettre, avec la complicité de toute la société, d’accepter de donner la mort.
On nous accuse de ne pas entendre les souffrances qui peuvent accompagner la fin de vie et si nous nous opposons à la proposition de loi, c’est que nous voudrions que nos concitoyens meurent dans la souffrance. Nous tenons ici à clamer le contraire. En effet, la loi Claeys Leonetti repose sur un triptyque : personne ne doit mourir dans l’isolement, personne ne doit subir d’acharnement thérapeutique et enfin personne ne doit souffrir au moment de sa fin de vie. Que les soins palliatifs ne soient pas suffisamment développés dans notre pays est une évidence et nous voulons œuvrer pour les déployer davantage. Que la loi actuelle ne soit pas toujours correctement mise en œuvre l’est également. Mais lorsque nous défendons un statu quo, de grâce, que l’on ne nous accuse pas de vouloir faire souffrir nos concitoyens. L’enjeu est de nature éthique.
Alors oui, nous pensons qu’il serait bien plus important de faire appliquer la loi existante et d’en faire un bilan avant de vouloir toucher à notre arsenal juridique actuel : inscrire dans la loi que donner la mort deviendrait une sorte de solution thérapeutique ultime nous choque. Nous sommes très étonnés que notre point de vue ne soit pas davantage considéré. Surtout dans une période où tant de soignants luttent pour arracher des griffes de la mort tant de patients.