Patrick Hetzel : rapporteur spécial du budget de la justice

Economie

En sa qualité de rapporteur spécial du budget de la justice, Patrick Hetzel a prononcé l'intervention suivante en commission élargie :

« Le projet de loi de finances pour 2018 propose, pour ce qui est de la mission Justice, un nouveau budget en croissance fondé sur l'augmentation des crédits et des emplois de l'ensemble des programmes. Seule l'Administration pénitentiaire voit ses autorisations d'engagement diminuer à raison du ralentissement observé dans l'engagement des opérations relevant du plan de construction de places de prison destinées à permettre l'application dans les faits du principe d'encellulement individuel. Le montant des Autorisations d'Engagements et des Crédits de Paiement demandés s'élève respectivement à 9 028,72 millions d'euros (– 16,36 % par rapport à la LFI pour 2017) et à 8 542,95 millions d'euros (+ 2,30 %). À périmètre constant, la progression des CP atteint 3,8 % par rapport à la LFI pour 2017. Le plafond d'emploi est porté à 84 969 équivalents temps plein (contre 83 216 dans la LFI pour 2017).

Pour autant, rien n'assure que la programmation retenue contribue réellement au renforcement de l'efficacité de la Justice. Les objectifs de la maquette de performance demeurent assez limités ; si elle tire parti de simplifications procédurales, pose les premiers jalons d'un renforcement du secrétariat général du ministère et engage un plan de transformation numérique, la programmation parait néanmoins devoir se heurter à d'importants problèmes structurels que constituent le poids des restes à payer, ainsi que des facteurs de rigidification ou de non maîtrise de la dépense.

Dans ces conditions, je recommande :

  • de déposer dès le premier semestre 2018 la loi de programmation évoquée lors de la présentation des grands chantiers de la Justice ;
  • de dégager les moyens qui permettent au Secrétaire général du ministère de la Justice, sur le long terme, d'assumer pleinement le rôle d'instance de pilotage que lui assigne le décret n° 2017-634 du 25 avril 2017 ;
  • de mettre pleinement en œuvre la transformation numérique du ministère de la Justice et du système judiciaire ;
  • d'engager de véritables réformes procédurales et de l'organisation du système judiciaire de nature à diminuer les délais de jugement ;
  • d'évaluer de manière précise l'impact des programmes immobiliers engagés avant d'entreprendre la mise en œuvre de nouveaux plans de cette nature ;
  • de fonder la maîtrise des dépenses pour frais de justice sur la poursuite de l'amélioration du circuit des dépenses, ainsi que sur ses actions de sensibilisation menées auprès des officiers de police judiciaire (premiers prescripteurs de frais de justice) et des chefs de cours ;
  • de repenser le dispositif de l'aide juridictionnelle de sorte d'assurer une meilleure régulation de la dépense et la viabilité de son financement.

Mes questions portent sur les deux points d'inquiétude suivants :

  • Comment le ministère de la Justice va-t-il procéder pour enfin justifier ses dépenses passées et maîtriser ses dépenses à venir en matière d'informatique et de numérique ? En effet, ce domaine a connu des errements majeurs dans un passé récent et il devient urgent d'y remédier comme l'a largement mentionné la Cour des Comptes.
  • Que comptez-vous faire pour procéder à une réforme de fond de l'aide juridictionnelle qui ne peut se résumer à des mesures ou économies de gestion telles que le relèvement des crédits budgétaires ou le renforcement des bureaux d'aide juridictionnelle (BAJ). »