Proposition de loi relative au droit de vote par correspondance des personnes détenues

Publié le 06/06/2025 dans les catégories Vie sociale Politique

Patrick Hetzel était l’orateur de son groupe parlementaire de la Droite Républicaine sur cette proposition de loi. Il est donc intervenu au cours de la discussion générale pour porter la parole de son groupe :

« Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Monsieur le Président de la Commission des Lois, Monsieur le Rapporteur, Mes chers collègues,

Le groupe de la Droite Républicaine soutient pleinement la proposition de loi dans sa version initiale relative au droit de vote par correspondance des personnes détenues.

Ce texte, déposé par notre collègue Madame la sénatrice Laure Darcos, vise à corriger une anomalie démocratique trop longtemps ignorée : aujourd’hui, si environ 50 % des détenus conservent leur droit de vote, moins de 2 % l’exercent effectivement. Cela représente moins de 1 000 votants sur environ 37 000 électeurs détenus potentiels. Pourquoi ce taux est-il aussi bas ? Parce que les modalités actuelles sont inadaptées, lourdes à mettre en œuvre et déconnectées du parcours de réinsertion des personnes concernées.

Prenons un exemple concret : dans la commune de Saint-Maur, dans l’Indre, l’établissement pénitentiaire local représente à lui seul près de 9 % du corps électoral. À Arles, cette proportion est de plus de 6 %. Dans une demi-douzaine de communes françaises, les détenus inscrits au titre de la prison représentent plus de 5 % des électeurs. Cela n’est pas neutre quand on sait que lors des élections municipales, une poignée de voix peuvent suffire à faire basculer une majorité.

Cette situation crée une rupture de cohérence : un détenu, incarcéré pour une période parfois très courte, peut être amené à voter dans une commune où il n’a jamais vécu, et pour des élus locaux qu’il ne connaît pas. Cela va à l’encontre du principe fondamental selon lequel le droit de vote doit refléter un lien réel, personnel et territorial avec la collectivité.

C’est ce que cette proposition de loi corrige : elle supprime la possibilité de voter par correspondance lors d’élection locale, dans le chef-lieu du département ou la commune d’implantation de la prison, pour la remplacer par des critères bien plus pertinents. Le vote par correspondance serait ainsi réservé à la commune de dernière résidence, ou à celle de résidence des ascendants ou descendants, élargissant de manière réaliste les possibilités tout en respectant le lien civique.

Ce n’est ni laxiste, ni symbolique. C’est pragmatique.

D’autant que le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l’homme rappellent régulièrement que le droit de vote est un droit fondamental, qui ne peut être suspendu que de manière proportionnée, et avec des garanties précises.

En améliorant l’effectivité de ce droit, cette proposition renforce la citoyenneté active en détention, et ce, sans aucun abandon des principes de sécurité ni d’autorité. Le vote par correspondance est une modalité sûre, encadrée, dont les garanties logistiques sont bien connues : enveloppes sécurisées, double acheminement, contrôle de l’identité.

Par ailleurs, selon un rapport de l’administration pénitentiaire, la participation civique des détenus est un facteur de réduction des tensions carcérales. Elle donne un sens à l’incarcération, en l’inscrivant dans un parcours de responsabilité, et non de relégation.

Ce texte, enfin, évite les dérives que nous avons vues en commission : il ne multiplie pas les rapports sans suite ni les dispositifs irréalistes, comme l'installation généralisée de bureaux de vote en prison, qui supposerait des moyens humains, matériels et juridiques colossaux.

Nous appelons donc à un vote conforme au Sénat, sur la base du texte initial. Cela implique le rétablissement de l’article unique, et la suppression des ajouts adoptés en commission, qui déséquilibrent l’économie du texte.

Parce que la citoyenneté ne s’arrête pas aux portes des prisons, parce que la réinsertion commence par la reconnaissance de la responsabilité civique, et parce que l’équité démocratique doit aussi s’appliquer aux petites communes, le groupe de la droite républicaine votera en faveur de cette proposition de loi, dans sa version initiale, claire, équilibrée, et profondément républicaine. »